Karima Boudou (Ganges, France, 1987) est une historienne de l’art et commissaire d’exposition basée à Bruxelles et active dans le domaine des musées.
Elle a étudié l’histoire de l’art (Montpellier, Rennes) et la philosophie (Nanterre) et a participé au Curatorial Training Programme à De Appel, Amsterdam, de 2012 à 2013. Entre 2012 et 2022, elle a organisé des projets de recherche, des expositions, des conférences et des publications avec des institutions en Europe et au Maroc. Son travail croise théoriquement et pratiquement la théorie postcoloniale et la réactualisation des archives et des histoires décentrées de l’art moderne et contemporain, en considérant stratégiquement les politiques de vision et de visibilité dans l’histoire de l’art. En 2017, elle a été chercheuse au MAC VAL Musée d’art contemporain du Val-de-Marne, où elle a effectué des recherches sur les archives de Raoul-Jean Moulin. Son travail récent, réactivé depuis le Maroc, s’inscrit dans de nouvelles lignes de recherche sur la vie et l’œuvre du surréaliste afro-américain Ted Joans. Ce forum public de trois jours a tracé des points et des lignes entre les archives privées américaines et néerlandaises en réactualisant les héritages d'artistes et d'écrivains d'origine africaine dans le mouvement surréaliste international. Son travail le plus récent se concentre sur la vie et les archives de l'homme politique et panafricaniste Mehdi Ben Barka. Elle procède par résonance et ricochet pour questionner via de multiples ramifications l'histoire et l'identité - tout en croisant la praxis politique et la réflexion théorique. Les trois présentations publiques de cette recherche ont eu lieu à Formerly Known as Witte de With à Rotterdam (2020), au Berkeley Art Museum et au Pacific Film Archive (2021) et à West Den Haag (2022).
Boudou a donné des conférences sur les écrivains Jean Genet et Mohamed Leftah et sur les artistes Glenn Ligon, Danh Vo, Dave McKenzie et David Hammons. Elle a écrit pour des catalogues d'exposition (Mu.ZEE, Ostende, Belgique ; Le Cube, Rabat, Maroc) et des magazines (Mousse, Ibraaz, rekto:verso, Metropolis M). Elle a reçu une bourse du Collège des Bernardins à Paris. Le projet de Karima Boudou, dans le cadre du séminaire de recherche « L’art au Présent », portait sur l’œuvre du peintre américain Beauford Delaney (1901-1979). Avant le S.M.A.K., Musée d’art contemporain de la ville de Gand, elle a occupé le poste de collaboratrice scientifique à la Haute École des Arts (HKB) de Berne, en Suisse. De 2022 à 2024, elle a été commissaire au S.M.A.K., où elle a organisé des expositions personnelles et en duo avec Haegue Yang, Karlo Kacharava et Sirah Foighel Brutmann & Eitan Efrat, souvent dans le cadre de collaborations internationales.
Boudou est membre du Comité d’Acquisition de KANAL - Centre Pompidou à Bruxelles, de CIMAM et d’IKT.
Comment définir, de votre point de vue, le rôle de commissaire aujourd’hui? Ou : quels malentendus sont inhérents au titre glorifié et à la figure du « curateur"?
C’est un rôle qui lors des dernières décennies s’est consolidé et a pris de plus en plus d’importance, s’est médiatisé. De mon point de vue les tâches restent les mêmes que celles des commissaires plus traditionnels et historiques, à la différence que l’histoire de l’art a fait son chemin et que nous travaillons aujourd’hui avec des artistes qui pour certains d’entre eux questionnent les notions de subjectivité et d’authenticité, ce qui rend les choses plus complexes en questionnant notre héritage et nos systèmes de valeurs dans l’art contemporain; l’interprétation en est plus ardue.
Sur quel projet travaillez-vous actuellement?
Actuellement je fais une mission en tant que curator à L’Appartement 22 qui est un espace d’art contemporain basé à Rabat au Maroc. J’ai débuté là-bas avec une exposition personnelle de Fadma Kaddouri qui présente les différentes investigations qu’elle mène depuis plusieurs années sur la figure de l’écrivain marocain Mohamed Choukri. Avec l’artiste Judith Deschamps et le commissaire Manuel Ramirez nous préparons une publication qui fit suite à la performance « A la recherche de l’exposition présente » de l’artiste Judith Deschamps au Frac Bretagne fin 2012. Je prépare aussi une exposition monographique de l’artiste Donelle Woolford à la Biennale de Marrakech au Maroc. C’est une artiste que j’ai découverte lorsque j’étais à la faculté de philosophie à Nanterre et je l’avais invitée à la Maison Descartes à Amsterdam à montrer de fausses peintures historiques, ce qu’elle appelle ses « peintures cubistes ».